La respiration et la mobilité articulaire

Respiration = mouvement 

Nous avons discuté de la façon dont la respiration fournit à notre corps de l’oxygène afin de créer l’énergie nécessaire pour bouger. Nous pouvons observer notre corps bouger de différentes manières lorsque nous respirons. Mais y a-t-il plus qui unit la respiration à la façon de bouger? 

Le diaphragme a un rôle plus grand que simplement déplacer l’air vers les poumons et hors de notre corps. Ce muscle est relié à presque toutes les parties du corps. En effet, il se rattache à des zones comme nos épaules, nos hanches et notre bassin, puis se lie même jusqu’à notre palais et à notre cou via des tissus conjonctifs et des nerfs! Ces connexions sont extrêmement pertinentes pour les physiothérapeutes. 

Respirer pour mieux bouger et mieux vivre

En raison de ces connexions complexes, un changement dans la respiration d’une personne peut influencer directement le fonctionnement des articulations environnantes. 

Prenons cet exemple:  Jessica s’est cassé la clavicule et a dû maintenir son bras dans une écharpe pendant plusieurs semaines pour lui permettre de guérir. Son articulation de l’épaule est devenue raide à cause du manque de mouvement. Son patron respiratoire et sa posture ont changé en raison de sa douleur et de l’immobilisation de tout son bras. Maintenant, l’os cassé a guéri, mais tout semble « coincé ». Si nous ne travaillons que l’articulation de son épaule, elle pourrait maintenir cette nouvelle façon limitée de respirer simplement par habitude. L’ajout de travail respiratoire dans le but d’aider à élargir sa cage thoracique et d’éveiller ses muscles de la respiration, qui n’ont pas été utilisés dans leur amplitude complète, est crucial pour l’aider à retrouver sa pleine mobilité articulaire. 

Respirer pour soulager la douleur

Des études ont montré des liens entre des patrons respiratoires altérés et des douleurs au cou, des douleurs orofaciales, des maux de dos et des douleurs pelviennes. Le stress et la douleur peuvent également changer la façon dont nous respirons et ainsi entraîner des tensions musculaires et des restrictions de mobilité de nos articulations. La respiration dite apicale (de la partie supérieure du thorax) et l’hyperventilation sont toutes deux liées à la douleur. C’est pourquoi l’évaluation de la respiration est un élément clé de la prise en charge en physiothérapie.  

Voici un exemple classique:  Marc s’est blessé au dos en soulevant un lourd sac de terre l’été dernier. Les tissus ont guéri, mais il est maintenant inquiet chaque fois qu’il doit se pencher pour soulever quelque chose. Cette appréhension lui fait retenir son souffle lorsqu’il se penche pour soulever un objet. Le fait de bloquer sa respiration crée une pression excessive dans son abdomen limitant la quantité de mouvement disponible dans ses articulations, notamment dans ses hanches, ce qui l’oblige à compenser avec son dos. Il place ainsi les muscles de cette région dans une position plus allongée, dans laquelle ils sont plus faibles. Cela augmente donc ses risques de blesser cette même région. Il se crée alors un cercle vicieux puisque Marc continue inconsciemment d’utiliser cette stratégie : bloquer sa respiration. Lui faire prendre conscience de sa respiration, s’assurer qu’il ne retienne pas son souffle et lui rappeler que le fait de se pencher n’est pas dangereux peut être suffisant pour briser le cycle! Changer les habitudes demande du temps et de la pratique. Nous explorerons ces concepts dans les prochains articles. 

Essayez cette petite expérience:  allongez-vous sur le dos (si cela fonctionne pour vous! Soyez attentif à toute blessure ou douleur existante). Commencez à observer votre respiration. Remarquez où vous la ressentez dans votre corps. Si possible, amenez un genou à votre poitrine, en tenant la jambe aussi près de votre poitrine que possible à l’aide de vos bras ou d’une serviette. Observez votre respiration maintenant. A-t-elle changé? Remarquez l’amplitude de mouvement qui est disponible dans votre hanche fléchie. Peut-être ressentez-vous une sensation d’oppression ou de pincement, assurez-vous d’être doux avec votre corps et de ne pas aller trop loin dans l’inconfort. Maintenant, inspirez profondément. En expirant, relâchez complètement et voyez si vous êtes capable d’approcher un peu plus votre genou vers votre corps. Essayez ceci plusieurs fois, en utilisant votre respiration pour créer de l’espace dans votre corps pour votre hanche. Relâchez lentement la jambe et prenez quelques instants pour vous reposer sur le dos. Prenez à nouveau conscience de votre respiration et de toutes les sensations qui ont pu apparaître dans votre corps. Comparez ces sensations avec l’autre jambe. Avez-vous remarqué un lien entre votre respiration et l’amplitude de mouvement disponible dans vos hanches? 

Respirer lorsque vous bougez est la stratégie la plus efficace pour vous et celle qui vous permet de répartir la charge entre les différentes parties du corps afin que vous ne surchargiez aucune région. 

Pour en savoir plus à ce sujet, restez à l’affût pour notre prochain article! 

La série de chroniques:

Intro : Oser respirer
1. Le diaphragme : Respirer activement
2. Respirer : l’offre et la demande
3. La respiration et la mobilité articulaire
4. Le diaphragme : Un réseau de connexions
5. La respiration et nos émotions
6. Comment le stress peut affecter la respiration
7. La respiration: Un outil puissant pour lier le corps et l’esprit
8. Moduler la respiration pour prendre le contrôle
9. Le pouvoir de la pleine conscience et de la méditation
10. Yoga: Transformer le corps et l’esprit

 

Références:
Prosko, S. (2019). Breathing and Pranayama in Pain Care. In: Pearson N, Prosko S, Sullivan M (Eds). Yoga and Science in Pain Care: Treating the Person in Pain. London, Uk: Singing Dragon Publishers; pp. 140-156.